CONTEXTE
Le pâturage des couverts par un troupeau de bovins ou d’ovins est une pratique qui connaît depuis quelques années un renouveau. Parmi les adeptes de la techniques, on trouve bien évidement des exploitations historiquement en polyculture-élevage qui valorisent cette source de nourriture potentielle, quelques exploitations céréalières qui réintrègrent de l’élevage mais aussi des partenariats entre céréaliers et éleveurs. Les bénéfices pour les animaux sont désormais bien documentés. En effet, les couverts sont constitués de plantes jeunes avec des valeurs alimentaires très importantes : 100 g de PDI pour 0,9 UF. A titre de comparaison ces valeurs sont comparables à un aliment d’engraissement pour agneaux ou à une repousse d’herbe d’automne. De plus, les animaux peuvent y être introduits pour la plupart des couverts sans transition alimentaire. De plus, les parcelles de couverts présentent une charge en parasite quasi nulle.
Toutefois, les bénéfices pour les cultures sont bien moins connus même si beaucoup d’agriculteurs considèrent le pâturage comme une pratique économiquement (permet d’éviter un broyage) et agronomiquement (accélère la mise à disposition des éléments minéraux) vertueuse.
“C’est un broyeur à l’avant et un épandeur à l’arrière”
QUELS IMPACTS AU NIVEAU DE LA PARCELLE ET DE LA CULTURE SUIVANTE ?
En effet, les références sur l’effet du pâturage des cultures intermédiaires sont peu nombreuses et la totalité est issue de publications internationales.
On peut toutefois remarquer que le pâturage des couverts a un impact très positif sur la dynamique de l’azote dans le système ainsi que sur les processus impliquant la vie du sol. De plus, l’analyse de la bibliographie permet de mettre en évidence des points de vigilance notamment sur les conditions de pâturage (pour les bovins) qui peuvent induire un effet négatif de la pratique sur la structure et les propriétés physiques du sol.
EXPORTATION D’ELEMENTS MINERAUX PAR LES ANIMAUX
Les animaux en consommant le couvert sur place restituent une grande partie des éléments minéraux qu’il contient :
Elément | N | P | K | Source |
---|---|---|---|---|
Exportations (g/kg de gain de poids vif ) | 27.2 | 6.8 | 1.5 | Thiessen-Martens & Entz (2011) |
Restitution (% du couvert) | 75-95 | 64-90 | >90 | Thiessen-Martens & Entz (2011) |
via les urines (% des restitutions) | 67 | ~0 | 88 | Bloor et al. (2012) |
via les fécès (% des restitutions) | 33 | ~100 | 12 | Bloor et al. (2012) |
De plus, ces éléments sont restitués sous des formes pour la plupart immédiatement disponibles pour les plantes. Par exemple, l’azote contenu dans les urines est présent sous la forme d’urée.
IMPACT SUR LA QUANTITE DE MATIERE ORGANIQUE RESTITUEE
Si les animaux restituent une très grande partie des éléments ingérés, ça n’est pas le cas pour la matière organique en général. En effet les animaux ingèrent en général entre 40 et 85 % de la biomasse aérienne du couvert (Ciceck et al. 2014) et seulement 15 % de la matière sèche ingérée est restituée au sol (Bloor et al. 2012). C’est entre 30 % et 50 % de la biomasse aérienne qui n’est pas restituée. Ces pertes de matières (carbone principalement) ont lieu au niveau du rumen des animaux où la biomasse végétale est digérée et où une partie du carbone est rejetée dans l’atmosphère. Finalement, si une partie du carbone est évacuée tandis que les autres éléments sont restitués dans leur quasi totalité, le C/N ou C/P des matières organiques restituées après pâturage est diminué rendant ces éléments encore plus disponibles après minéralisation.
🔍 ZOOM SUR … LA MISE A DISPOSITION D’AZOTE
Des restitutions immédiates significatives
Suite au pâturage des couverts l’azote est plus facilement disponible dans le sol.
Une minéralisation nette plus importante
Comme évoqué précédemment, lors du pâturage peu d’éléments minéraux sont exportés mais une part significative du carbone est quant à elle minéralisée et rejetée dans l’atmosphère lors de la digestion des ruminants. Ainsi le pâturage tend à concentrer l’azote restitué :
Pour le cas du pâturage des ovins, les fécès ont une concentration en azote supérieure aux végétaux ingérés ce qui accroît la minéralisation nette du couvert. On peut alors imaginer que le pâturage puisse limiter l’immobilisation de l’azote induit par l’incorporation de résidus de couverts pauvres en azote (couverts très développés d’espèces non légumineuses).