La question de la date de destruction des couverts a été moins abordée que celle de la date d’implantation malgré le fait que les agriculteurs aient plus de marges de manoeuvre du point de vue organisationnel. Toutefois reporter la destruction des couverts peut demander plus de souplesse et de réactivité vis-à-vis du climat. Retarder la destruction du couvert permet en thérorie d’allonger le cycle de végétation de la culture intermédiaire, augmenter le potentiel de production du couvert et in fine les niveaux de services rendus. Aussi, le cycle de végétation des couverts d’interculture tels qu’ils sont pratiqués couramment ne cumule pas assez de degrés jours pour valoriser correctement les légumineuses. Dans ce réseau d’essai, l’allongement de la durée de végétation a pour objectif d’améliorer le service “mise à disposition d’azote à la culture suivante” avec la production accrue de légumineuses et la fixation symbiotique.
Dispositif expérimental
Avec l’objectif d’augmenter la fixation symbiotique des légumineuses, trois mélanges ont été implantés et comparés à deux conduites témoins (moutarde blanche et sol nu).
Chacun des mélanges comporte des espèces tolérances et sensibles au gel. Les mélanges ont pu évoluer à la marge au fil des campagnes pour écarter des espèces à trop faible développement au profit d’autres jugées plus prometteuses.
Par ailleurs pour chaque mélange deux dates de destruction ont été testées :
- Entrée hiver (fin novembre - début décembre)
- Sortie d’hiver (fin mars - début avril)
Des mesures ont été réalisées tout au long de l’interculture mais aussi sur la culture suivante en loccurence un maïs. Ces suivis ont pour objectif de vérifier l’effet de la date des destruction et des mélanges riches en légumineuses sur la dynamique de l’azote mais aussi sur le développement de la culture suivante.
Maintenir un couvert tout l’hiver permet-il d’augmenter la biomasse produite ?
Ca dépend de l’espèce utilisée et du développement du couvert en entrée hiver !
En effet, certaines espèces ont une meilleure capacité à croître durant l’hiver et nécessitent moins de température. Dans les essais mis en place, légumineuses ont su conserver leur biomasse au cours de l’hiver voire même à croitre selon les espèces choisies tandis que la biomasse des non légumineuses (hors repousses de céréales) a tendance à décroitre. Ainsi la proportion de légumineuses en mélange augmente durant l’hiver. Ainsi le C/N du couvert baisse.
Quel effet de la date de destruction sur la quantité d’azote disponible au semis du maïs ?
Quelle que soit le couvert présent, la disponibilité en azote augmente entre l’entrée et la sortie d’hiver. Dans cet essai (Dorengt 2018-2019), la disponibilité en azote minéral est forte juste après la récolte du précédent. Le couvert joue alors son rôle de piège à nitrate même dans les modalités riches en légumineuses (plus de 80 %) en réduisant le stock d’azote minéral en entrée d’hiver. Durant l’hiver, le sol à tendance à s’enrichir en azote sous les modalités couvertes pour rattraper le sol nu en sortie d’hiver. Cette dynamique est vérifiée surtout pour les couverts détruits et incorporés en entrée d’hiver qui commencent plus tôt leur minéralisation. Ainsi le retard de destruction des couverts retarde leur minéralisation et induit des reliquats entrée d’hiver plus faibles.
Quelle minéralisation du couvert pendant la période végétation du maïs ?
L’utilisation du modèle de culture STICS permet grâce à une caractérisation des résidus de couverts (teneurs en azote principalement) de quantifier leur minéralisation et donc les quantités d’azote mise à disposition de la culture au cours de la campagne.
Les données produites par le modèle montrent que la plupart des résidus de couverts fournissent de l’azote à la culture suivante au cours de la campagne. Les modalités qui fournissent le moins d’azote en cours de campagne sont la moutarde blanche et le sol nu (restitution de repousses de blé).
Par ailleurs, dans les simulations, les restitutions d’azote en cours de camapgne sont plus importantes pour les couverts détruits au printemps.
Ainsi le report de la destruction des couverts au printemps a pour conséquence de :
* limiter le niveau de reliquat en sortie d’hiver (et donc l’exposition à la lixiviation)
* augmenter la minéralisation de l’azote des couverts du la phase de végétation de la culture suivante.
Impact sur le rendement de la culture suivante
Les essais ont été conduits avec des niveaux de fertilisation fortement réduits par rapport au reste de la parcelle. Dans certains cas (Dorengt 2018-2019 et 2019-2020), une impasse a de fertilisation a été réalisée. Néanmoins, la productivité des essais reste élevée et peu expliquer le peu de différence observées entre les modalités.
Dans nos essais, les couverts ont eu peu d’impact sur le rendement du maïs suivant. De plus, il est généralement négatif sur le rendement du maïs dans les conditions de l’essai. L’effet de la date de destruction est peu clair quant à lui car tantôt positif tantôt négatif.
Ainsi l’effet des couverts sur le rendement de la culture suivante n’est uniquement lié à l’azote car les essais ont montré un effet positif des couverts sur la disponibilité en azote (Effet neutre à négatif sur le RSH et très positif sur MrCI). Ainsi d’autres mécanismes que l’azote peuvent expliquer ces différences comme la disponibilité en eau, en d’autres éléments minéraux ou l’état structural du sol.
Destruction tardive des couverts : un risque pour la disponibilité en eau ?
En effet retarder la date de destruction des couverts peut en théorie impacter le niveau de remplissage de la réserve en eau du sol au moment du semis de la culture suivante puisque le couvert risque de consommer une partie de la réserve en eau du sol pour sa croissance qui n’aura pas le temps de se reconstituer d’ici le semis de la culture suivante. Toutefois, le couvert contribue également à une meilleure conservation de l’eau dans en limitant son évaporation par effet de “mulch”. De plus, la consommation d’eau par le couvert au printemps est très variable selon sa croissance et sa date de destruction.
Les données collectées sur les essais de Verneuil, Dorengt et Vervins au moment du semis du maïs montrent que dans le cas de destruction modérément tardive (fin mars, début avril) les couverts n’ont pas d’impact négatif sur le remplissage de la réserve en eau du sol. Dans certaines situations, l’effet de réduction de l’évaporation de l’eau du sol est supérieur à la consommation d’eau par le couvert conduisant à un meilleur remplissage de la réserve utile lorsque le couvert est détruit tardivement.
En conclusion !
🌱 Les couverts continuent d’acquérir de la biomasse au cours de l’hiver.
💧 La destruction des couverts au printemps permet de limiter la disponibilité en azote dans le sol durant l’hiver et donc les pertes par lixiviation.
♻️ La fourniture en azote par les résidus de culture intermédiaire.
🌽 Retarder la destruction des couverts n’a pas d’effet sur le rendement de la culture suivante.
💧 Lorsque la destruction intervient en début de printemps (début avril), elle a très peu d’impact sur la réserve en eau du sol.