FICHE SERVICE : Effet des couverts sur la vie du sol

Les couverts représentent un allier important pour améliorer la vie du sol (amélioration du milieu, productions de substrats pour les microorganismes, apport de matières organiques fraîches lors de la destruction). Même si les légumineuses apparaissent les plus efficaces, la biomasse produite semble être un levier important pour maximiser l’effet des couverts !

QU’EST-CE QUE LA VIE DU SOL ?

Elle représente l’ensemble des êtres vivants présents dans le sol et répartis dans un nombre important de familles (Figure 1). Tous ces organismes participent à leur échelle au fonctionnement et l’évolution du sol et plus particulièrement de sa fraction organique.

Taille des organismes présents dans une parcelle cultivée (Adapté de [Swift et al. 1979](http://agris.fao.org/agris-search/search.do?recordID=US8108702){target='_blank'})

Figure 1: Taille des organismes présents dans une parcelle cultivée (Adapté de Swift et al. 1979)


Leur abondance dépasse souvent l’imagination.

Tableau 1 : Biomasse des organismes du sol en région tempérée (D’apres Gobat et al. 2010)





Les services rendus par la vie du sol

Même si cette partie de l’agro-ecosystème reste tres largement méconnue (seuls 10 % des micro-organismes identifiés d’après Gobat et al. 2010), les services ecosystémiques qu’elle rend à l’agriculture sont, pour la plupart, clairement identifiés :

Tableau 2 : Services écosystèmiques rendus par les différents groupes d’organismes du sol (adapté de Barrios 2007).

EFFETS DES COUVERTS

Les couverts d’interculture peuvent avoir un impact sur l’activité biologique du sol en :

  • Modifiant les conditions du milieu (humidité, température)
  • Libérant des composés lors de leur croissance (rhizodéposats) stimulant le developpement de microorganismes favorables pour la plante (mycorhize, bactéries fixatrices).
  • Constituant un apport de matière organique fraîche au sol lors de leur destruction. Elle servira de substrat aux organismes du sol pour se développer.

Tableau 3 : Effet des couverts sur différents indicateurs de l’activité biologique du sol

Dans la plupart des publications identifiées à l’échelle internationale, les couverts d’interculture semblent avoir un impact positif significatif sur l’activité biologique du sol et ainsi que sur les indicateurs des services rendus par celle-ci (activité enzymatique, teneur en facteurs agrégeants améliorant la stabilité structurale). Les légumineuses semblent avoir un effet supérieur aux autres espèces pour la plupart des indicateurs. Une hypothèse est que cette différence réside dans la quantité de composés émis au niveau de la rhizosphère.

Maximiser la biomasse produite

Des auteurs montrent qu’une partie des variations de l’activité biologique observées sous l’effet des couverts est expliquée par des différences de productivité entre les couverts testés. Il semblerait qu’indépendamment de l’espèce, augmenter la biomasse produite par le couvert permette d’accroître leur effet sur l’activité biologique (Tableau 4). Intuitivement on comprend qu’augmenter la quantité de biomasse restituée permet d’augmenter les ressources disponibles pour le développement des organismes qui décomposent la matière organique et produisent des composés secondaires substrats pour le développement d’autres groupes organismes ou servant eux même de nourriture à d’autres organismes.


Tableau 4 : Corrélation entre biomasse produite par le couvert et les indicateurs de l’activité biologique (Balota et al. 2014)





Influence de la qualité des résidus

Barel et al. (2019) montrent que la vitesse de décomposition de diverses matières organiques dans la culture suivante (comme indicateurs de l’activité biologique) est influencée par la nature du couvert. En plus d’être liée a la quantité de biomasse restituée par celui-ci, elle est affectée par la qualité des residus de la culture intermédiaire. Cet effet “d’héritage” sur l’activite biologique est favorisé par des teneurs en lignine du couvert faibles. Ainsi des sols avec amendés avec des résidus de cultures intermédiaires rapidement décomposables ont tendance à avoir des vitesses de décomposition plus élevées pour des résidus restitués par ailleurs.

LEVIERS POUR EN MAXIMISER L’EFFET

Choisir les bonnes espèces

  • Choix des espèces

Tableau 5 : Vitesse de croissance de différentes espèces de couverts en conditions non limitantes d’eau et d’azote

  • Recours aux mélanges

Le recours aux mélanges permet en tendance d’améliorer la productivité des couverts. Au-delà du nombre, il importe de choisir des espèces qui soient suffisamment differentes les unes des autres (diversité fonctionnelle) pour utiliser au mieux leur complémentarité pour l’utilisation des ressources du milieu (lumière, eau, éléments nutritifs).

Lien entre biomasse produite par le couvert, richesse spécifique et diversité fonctionnelle ([Florence et al. 2016](https://www.researchgate.net/publication/302564107_Cover_Crop_Mixture_Diversity_and_Function){target='_blank'})

Figure 2: Lien entre biomasse produite par le couvert, richesse spécifique et diversité fonctionnelle (Florence et al. 2016)

Date de semis

Pour maximiser la durée de végétation du couvert et la biomasse produite, le moyen le plus efficace est d’obtenir un établissement rapide du couvert après la culture précédente (1 jour d’août = 4 jours de décembre). La biomasse produite par le couvert décroit très rapidement avec le recul de la date de semis ainsi que le panel des espèces les plus intéressantes (légumineuses).

Date de destruction

Pour viser des dates de destruction tardives (sortie hiver), il est impératif que le mélange comporte des espèces capables de se développer durant et après l’hiver. Choisir des espèces de couverts ayant des croissances en relai.

Evolution de la biomasse du couvert au cours de l'interculture (Essai Maintien de legumineuses - Verneuil sur Serre 2018-2019)

Figure 3: Evolution de la biomasse du couvert au cours de l’interculture (Essai Maintien de legumineuses - Verneuil sur Serre 2018-2019)

De plus Patkowska et al. (2019) montrent qu’avant un salsifis la destruction tardive du couvert tend à favoriser la population de bactéries du sol et notamment celles impliquées dans la régulation de plusieurs pathogènes. Par ailleurs, l’effet des couverts sur certains services, comme l’amélioration de la stabilité structurale, n’est pas parfois que transitoire. En effet Abiven et al. 2009. indiquent que l’effet de la restitution d’engrais verts au sol améliore la stabilité structurale de manière importante uniquement durant les quelques semaines qui suivent sont incorporation. Cet effet est lié à la production par les micro-organismes lors de la décomposition des résidus de composés améliorant la résistance du sol aux différentes contraintes (pluie battante, travail du sol).

Evolution de la stabilite structurale suite a l'incorporation de differentes matieres organiques ([Le Guillou 2005](http://www.theses.fr/2011NSARD061) adapte de Monnier 1965)

Figure 4: Evolution de la stabilite structurale suite a l’incorporation de differentes matieres organiques (Le Guillou 2005 adapte de Monnier 1965)

Une destruction tardive du couvert pourrait permettre de synchroniser le maximum de stabilité structurale aux périodes où les sols sont les plus vulnérables (installation des cultures de printemps),

Choix de l’itinéraire technique

Le choix de l’itinéraire technique d’implantation influence la productivité du couvert : Voir Synthese d’essai : Réussite des couverts d’interculture : sous quelles conditions ?

POUR ALLER PLUS LOIN

L’effet des couverts est souvent étudié concomitamment à d’autres pratiques culturales comme l’intensité du travail du sol ou le niveau de fertilisation minérale (N, P). Celles-ci ont généralement un impact négatif sur les indicateurs liés à l’activité biologique du sol. Ainsi, une recherche de l’amélioration de l’activité biologique du sol implique une réflexion à l’échelle du système dont la culture intermédiaire ne constitue qu’un levier.

A vos claviers !

TRAVAUX CITES

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